A l’occasion d’un déplacement en Saône-et-Loire avec Olivier Véran, le ministre des solidarités et de la santé, et Brigitte Bourguignon, la ministre déléguée chargée de l’autonomie le premier ministre, Jean Castex, a annoncé plusieurs mesures en direction des personnes âgées et en situation de handicap. Toutes figurent dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS 2022) présenté aujourd’hui. Cela devrait impacter à la foisles personnes âgées, leurs familles, et les personnels des soins à domicile et des Ehpad.
Une allocation personnalisée d’autonomie (APA) de 22 euros pour tous les départements
Selon leur degré de dépendance, les personnes âgées peuvent recevoir, de la part des départements, une allocation personnalisée d’autonomie (APA). Mais elle n’est pas la même selon ces départements, qui fixent librement leur montant, ainsi que celui de la prestation de compensation du handicap (PCH). Le reste à charge varie donc selon l’endroit où vit la personne.
A partir de 2022, tous les départements devront verser des montants d’APA et de PCH au moins égaux à un tarif plancher de 22 euros.
Cela devrait inciter plus de personnes âgées qui y ont droit à la demander. Certaines, en effet, renonçaient à l'APA à cause d'un reste à charge trop important pour elles, se privant ainsi d'une aide à domicile ou d'une auxiliaire de vie. Aladom, le référent de la petite annonce pour l'aide à la personne, permet de trouver une aide aux personnes âgées dans toute la France.
Qui paye ?
Pour tous les départements qui ont un tarif référence inférieur à 22 euros,l’État s’engage à prendre en charge la différence, par la branche autonomie par l’intermédiaire de la Caisse Nationale de Solidarité pour l’Autonomie (CNSA).
Cette mesure sera financée par l’État à hauteur de 240 millions d’euros en 2022.
Aides à domicile du privé : vers des augmentations de salaires
Ce tarif APA minimum concerne l’ensemble des services d’aide et d’accompagnement à domicile (SAAD).
Ceci devrait permettre aux structures privées de pouvoir augmenter les salaires de leurs aides à domicile (comme cela va être le cas pour les structures associatives à partir du 1 er octobre où les 200 000 professionnels des services d'accompagnement et de soins de la branche d'aide à domicile verront leur salaire augmenter de l'ordre de 15 %, dans le cadre de l'avenant 43).
3 euros de plus de l’heure pour intervenir à domicile la nuit le week-end ou dans les zones rurales
Cette dotation qualité d’environ 3 euros par heure d’intervention à domicile serait versée aux structures pour les interventions la nuit, le week-end ou dans des zones rurales ou difficiles d’accès.
Qui paye ?
Cette somme serait versée par les Conseils départementaux directement aux Services d’Aide et d’Accompagnement à Domicile (SAAD). La mesure est encore en cours de négociation avec l’Assemblée des Départements de France.
Un nouveau système de rémunération pour les soins infirmiers à domicile
La tarification des services de soins infirmiers à domicile (SSIAD) sera revue pour 2023. Ceci devrait permettre aux professionnels des SSIADde consacrer plus de temps aux personnes aux besoins les plus importants, ou de mobiliser pour elles une « expertise avancée ». Aujourd’hui, les besoins en soins des personnes n’est pas pris en compte dans la tarification, etles SSIAD reçoivent les mêmes financements que les soins soient légers et rapides, ou qu’ils relèvent d’actes techniques.
Qui paye ?
Une enveloppe de 130 millions sera par ailleurs programmée dans le cadre du PLFSS sur une base pluriannuelle
Grand âge : un seul service autonomie pour remplacer les SAAD, SSIAD, et SPASAD
Entre 2022 et 2025, les différentes catégories de services à domicile existants services aide à domicile (SAAD), services de soins infirmiers à domicile (SSIAD), et services polyvalents d'aide et de soins à domicile (SPASAD) fusionneronten une seule catégorie dénommée « services autonomie ». Ce devrait faciliter la vie des familles, avec un interlocuteur unique, et améliorer la qualité des accompagnements.
EHPAD : 10 000 personnels soignants supplémentaires d’ici 5 ans et plus d’infirmières de nuit
Manque de personnel soignant, établissement insuffisamment médicalisés, nécessité de s’ouvrir plus sur l’extérieur...Pour pallier ces problèmes, parmi d’autres, le PLFSS 2022 prévoit plusieurs mesures pour les Ehpad :
- un plan de recrutement des personnels soignants visant à embaucher 10 000 personnels soignants supplémentaires d’ici 5 ans ;
- une généralisation de la présence d’infirmières de nuit d’ici à 2023 ;
- des médecins coordonnateurs présent au moins deux jours par semaine dans toutes les structures ;
- plus d’unités Alzheimer
Plus de 400 millions d’euros de financements nouveaux pour les personnes âgées
Plus de400 millions d’euros de nouveaux financements sont prévus pour l'autonomie et le maintien à domicile des personnes âgées, dès 2022. Pour aller plus loin, voir aussi ledossier de presse du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS 2022).
Les réactions aux annonces de la semaine
En ce qui concerne l'instauration du tarif national socle de l'APA, Amir Reza-Tofighi, président de la Fédésap (fédération française des services à la personne) se félicite de ce qu’il qualifie « une mesure historique en faveur du secteur de l’aide et l’accompagnement à domicile, qui souffrait depuis vingt ans d’une hétérogénéité ». « Ce tarif national permettra d’unifier les tarifs départementaux de l’APA et la PCH et d’en finir avec les inégalités territoriales ». Il souligne cependant que « plusieurs chantiers demeurent ouverts et des interrogations majeures subsistent ».
La fédération nationale des associations de directeurs d’établissements et services pour personnes âgées (FNADEPA) déplore des mesures « insuffisantes » qui « ne permettent aucunement de pallier l’abandon de la loi Autonomie. » Selon elle, « l’enveloppe annoncée du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) s’inscrit seulement dans la continuité des années précédentes. » Elle souligne que le tarif plancher « ne permet aucunement d’assurer la pérennité du modèle économique » des services à domicile. Elle déplore le décalage entre l’annonce des 10 000 recrutements prévus en Ehpad sur 5 ans par rapport au « besoin réel en EHPAD de 350 000 recrutements d’ici 2024 »
Des annonces pour le grand âge dans un contexte de mécontentement
Ces annonces de Jean Castex concernant les personnes âgées arrivent dans un contexte de mécontentement, alors que l'abandon de la loi Grand âge et Autonomie, le 8 septembre dernier, avait suscité de vives déceptions de part et d’autre.
Grève des aides à domicile hier
Jeudi dernier, une journée de grève baptisée «24 heures sans aide à domicile » avait été organisée à l’appel de la CGT Santé. Elle visait à dénoncer les conditions de travail de la profession (occupée par des femmes à 96,4 %) : un temps partiel souvent imposé, un salaire brut moyen de 972 euros pour 15 ans d’ancienneté dans la branche.
Les revendications des aides à domicile portent sur :
- la revalorisation des salaires ;
- la prise en charge des frais réels notamment des frais kilométriques ;
- l’amélioration des conditions de travail et des journées moins morcelées ;
- des formations continues et qualifiantes, etc.